20 ème étape – Carrodano => San Torenzo via La Spezia soit 41,3 kilomètres = 53’018 pas (Cumulés = 600,4 kilomètres & 770’631 pas)

Longue étape débutée avant 7h00 mais superbe étape, débordante de sensations en tout genre…

Démonstration en commençant par la nature qui a accompagné la première moitié de notre marche, ruisseau, grenouilles amoureuses, végétation généreuse, le tableau était vraiment agréable.



A force de croiser ces stèles à la mémoire de jeunes gens ayant perdu la vie sur les routes que nous empruntons journellement, j’en viens à être convaincu que nous devrions également adopter cette coutume « chez nous ».

Premièrement par respect pour ces trop courtes existences dont les proches doivent avoir encore plus besoin de témoigner qu’elles ont été importantes et remplies d’amour ; puis pour les autres jeunes, ceux qui pourraient aussi se sentir invincibles, apercevoir un monument comme ceux-là dans un virage doit sans aucun doute inciter à lever le pied…



Peu avant d’arriver à la Spezia, la nature encore



Nature qui a su se montrer généreuse grâce aux yeux de lynx de Manu… Il y a 2 jours, il m’a demandé quel était mon fruit préféré, sans hésitation j’ai répondu les fraises des bois que ma mère tentait de cultiver dans le jardin mais que je mangeais au fur et à mesure.

Elles ont pour moi cette double qualité d’une saveur incomparable et d’un heureux souvenir d’enfance, ils ne sont pas si nombreux…

Aujourd’hui, tout à coup Manu m’a appelé : « Papa, papa, regarde ! », je me suis retourné, ai regardé sans rien voir, il a insisté : « Regarde, là, tes fruits préférés… ». Cachées sous de hautes feuilles, un tapis de fraises attendait d’être remarqué… et mangé, merci Manu !



Quelques kilomètres plus loin, nous admirions le vol des martinets lors de leur chasse aux moucherons, ils virevoltaient, tournaient sur l’aile, faisaient des piqués, des tonneaux, etc… le modeste pilote privé d’hélicoptère que je suis en est resté bouche bée jusqu’à ce que… un des ces kamikazes heurte un pare-brise de voiture et tombe sur le bord de la route.

Nous nous sommes précipités pour le mettre en sécurité et tenter de le réconforter. Après quelques caresses et autant de mots d’encouragement, notre presque homonyme a pu reprendre son envol !



Je pense que vous vous souvenez de cette photo de lundi dernier qui montrait un panneau indiquant : « La Spezia – 96 km », imaginez notre joie lorsque nous avons vu celui-là



De loin, La Spezia s’annonçait prometteuse



De près, cela ne nous a pas convaincu et nous nous sommes contentés d’y manger et de reprendre notre chemin pour trouver un endroit vraiment sympathique pour dormir. Ce que nous sommes enfin parvenus à faire à plus de 17h00 en arrivant à San Torenzo.

Grand village ou très petite ville de bord de mer, nous allons y passer quelques heures qui, je l’espère, requinqueront Manu qui a été très très courageux aujourd’hui !



En prolongeant la réflexion d’hier, j’ai envie de comparer les 16 kilos que j’ai sur le dos lors de cette marche au choix d’une charge légère ( !) par rapport à celle de la vie de tous les jours. Ces 2 sangles qui scient les épaules et font mal agissent en fin de compte comme des œillères qui m’interdiraient d’être distrait de mon objectif.

A l’exact contraire de mon existence « normale » dans laquelle je suis en permanence sollicité par des myriades d’informations parfaitement inutiles, ces efforts permanents pour me déplacer si lentement et si douloureusement ont cette extraordinaire vertu de me permettre de me concentrer sur le vrai sens de ce parcours terrestre.

Ne sommes-nous que des animaux un peu plus évolués que les autres ? N’avons-nous aucun autre espoir que cette vie en chair et en os ? Si au contraire, nous pouvons rêver d’une vie après la vie, pourquoi cet ailleurs nous serait-il réservé ? Que devons-nous faire pour prétendre le mériter ? Ma mère y est-elle ?

Dans ma hotte, j’ai des milliers d’autres questions, comme nous tous.

Ces 16 kilos sont la clé de la serrure de toutes les réponses ! Je ne prétends pas la trouver mais je m’acharne à la rechercher…

A demain



N.B : Pour l’anecdote, nous avons croisé nos premiers collègues pèlerins ce matin. Un couple de retraités français d’une soixantaine d’années, partis du Puy en Velay, qui prévoient une marche de 6 mois pour se rendre à… Jérusalem !

Comme quoi, même quand je n’en parle pas, c’est le chemin qui le fait pour moi (Il ne me reste qu’à : a) convaincre ma belle b) lancer « CyberDodo » c) un petit millier d’autres conditions préalables…)